[Quête/Ouverte] Une attaque organisée

Silvanus avait récolté un bon tuyau. On avait besoin d'un bandit pour une petite opération. Peu après l'arrivée de son client dans le port de Salte, des voyous, connus sous le nom de Mains Rouges l'avaient rossé et dépouillé de son argent. Ils étaient partis aussitôt, laissant le marchand seul, sans un sou et déboussolé. Ce dernier s'était donc rendu sur son navire, où par chance il gardait son coffre. Cependant, l'incident l'avait gravement vexé et il risquait de ne pas conclure son marché comme orévu - un véritable désastre pour les autorités locales. On avait immédiatement mis un bon prix sur les bandits. 80 Atris, exactement ce dont le bandit avait besoin.

Son bon tuyau allait bientôt porter ses fruits. Avec son autre ami bandit, ils allaient s'en charger. Mais d'abord, il fallait trouver leur repère, qu'on avait dit situé, comme celui de tous les criminels de Salte, dans le quartier Ouest. Silvanus y était donc - temps de trouver des renseignements. On trouvait les meilleures infos dans les tavernes, c'était bien connu et son premier arrêt fut donc dans le Poney Bleu. Il s'assit au comptoir, et tira trois pièces de sa bourse. Le tavernier, un homme costaud, le regardait suspicieusement tout en faisant semblait d'astiquer les verres.

« 'Cherchez pas des emm*rdes, hein... »

« Non, » sourit Silvanus, « je cherche des renseignements. Les Mains Rouges, ça vous dit quelque chose? »

« Les Mains Rouges? Jamais entendu parler. Maint'nant, j'vous préviens... » commença l'aubergiste avec une petite grimace. Silvanus sortit deux Atris supplémentaires, et les plaça devant celui-ci. La bouche de son nouvel ami continuait à former des sons, mais sans bruit. Il lui fallait un peu de temps pour assimiler le concept de la vente d'informations. « 'Chais pas, mais p'tet qu'un peu d'or supplémentaire pourrait réveillait ma mémoire. » fit-il avec un sourire niais, son petit doigt profondément enfoncé dans son oreille, qui en sortit recouverte de miel. Silvanus lui jeta un regard dégouté. Décidément, il n'avait plus rien à voir avec ces gens-là.

Il fit mine de reprendre ses pièces, avant de se lever lentement. « Un mendiant m'aurait tout dit pour 10 Brilles... Je perds mon temps ici. »

« Non, 'tendez! Pour une Atris, tout ce que je sais. »

Silvanus hocha la tête doucement... Et sortit deux Atris de sa poche. Inutile de perdre davantage de temps. « Dites-moi tout. »

« 'Sont huit. 'Cherchent à devenir une Guilde puissante. Ils aiment racketter les gens, c'est c'qui font le plus souvent. Ils ont une planque sous-terre... »

« C'est tout? »
« C'est tout. »

Silvanus se mit à marcher vers la sortie. Il avait eu tout ce qu'il voulait savoir -- ne lui manquait plus que leur emplacement exact.

Trouver leur location exacte ne serait pas une promenade de plaisir. Même si ce n'était qu'un jeune groupe de criminels, ils devaient avoir une planque astucieusement cachée. Le meilleur moyen de la trouver était de trouver leur emblème. Comme de nombreux criminels, ils devaient avoir un langage des signes qu'ils gravaient sur certains lieux. Retrouver l'un d'entre eux lui permettrait de les retracer pour accomplir sa mission.

Il traversa la ville, cherchant désespérément les petits sigles, gravés dans le bois, qui signalaient différentes choses aux criminels de son genre : qui fréquentait la taverne, si elle était souvent prise dans des affrontements, si le rapport qualité-prix était correct... Tout. Son but était de chercher un sigle peu commun, probablement une main. Il fit le tour du Quartier, sans rien trouver. Il désespérait. Comment les retrouver? Devait-il directement descendre dans les entrailles de la cité?

Silvanus était fatigué, las, et n'en pouvait plus. Il voulait l'argent, tout de suite! Il se traina jusqu'à son auberge, et s'y affala quelques heures.

Il émergea de son demi)sommeil la bouche pâteuse et l’œil vitreux. Il n'avait cependant pas le temps mais surtout l'envie d'attendre davantage. Il voulait son argent maintenant, et pour cela il devrait s'arranger de façon à les retrouver au plus vite pour avoir sa prime. Silvanus, dans un accès de paranoïa, avait l'impression qu'on risquait de bientôt chercher à lui dérober ses biens. Ce n'était sans aucune raison valable mais il se sentait en danger, comme si quelqu'un l'épiait vaguement. En sortant de l'auberge et en reprenant sa lente patrouille des rues, il ne cessait de se retourner, s'attendant presque à trouver quelqu'un derrière lui. Mais non, personne.

Alors qu'il entrait dans une ruelle moins fréquentée, quelqu'un sortit de l'ombre et le poussa contre le mur. La silhouette était encapuchonnée, il n'y avait pas moyen de voir sa tête.

"Tu veux la prime?" siffla l'inconnu. Silvanus tenta de se remettre sur pieds mais il fut repoussé par son interlocuteur. "C'est ça? La prime? Fais pas semblant que tu sais pas d'quoi j'parle. " Il frappa brutalement le bandit en plein estomac. Pris de surprise, ce dernier glissa le long du mur.

"Oui!" souffla le criminel, tout en essayant de regagner son souffle.

La silhouette s'écarta, plus détendue. "C'est bien... Tu as dit la vérité. Je m'appelle le fou et on m'appelle le sage. Drolatique, non? Je cherche moi-même ces individus." Silvanus ne put s'empêcher d'avoir l'air surpris. Ainsi, on l'avait bel et bien suivi.. "Oui," fit le Fou, amusé, "depuis la taverne. Debout. Nous devons marcher jusqu'à la forêt. Non, ils n'y sont pas. Mais je connais quelqu'un qui y est et qui nous dira où les trouver."

Le bandit se releva. Le fou ne fit aucun geste pour l'aider, mais ne l'empêcha pas non plus de faire quoi que ce soit. Avait-il le choix? Visiblement non : cet individu n'accepterait pas de refus.

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Toute cette affaire, notamment avec le Fou, qui lui faisait aller à la forêt pour parler deux secondes avec un jeune gars était décidément louche. Alors qu'il marchait sur les rues pavées de Salte, le Fou à ses côtés, il songea bien des fois à s'en débarrasser. Un coup ou deux suffiraient pour le mettre hors-jeu. Cependant, il y avait un je-ne-sais-quoi attachant dans le farfelu personnage qui le retenait. Il ne fit donc rien sur le chemin, alors qu'ils se dirigeaient vers la place fatidique, la maison abandonnée. On leur avait donné des directions sommaires qui les enfonçait dans le pire quartier du Quartier Ouest de Salte. Il fallait se frayer un chemin dans une petite cour des miracles parmi des mains qui tiraient, tiraient sur les vêtements, et des voix suppliantes d'hommes sur le point de crever de faim à même la rue.

Enfin, la foule se dispersa, et ils purent entrer dans la maison par la porte arrière qu'on leur avait indiqué. L'intérieur sentait la pisse et le vin de mauvaise qualité, mais bien moins qu'à l'extérieur. La pièce était plongée dans le noir, sans bougies à allumer, et de toute façon, Silvanus devinait aisément qu'il n'y avait rien à voir. Il tâtonna, trébucha sur quelque chose, tomba sur le sol... Le Fou, lui, l'attendait déjà, arc-brouté.

Il avait trouvé la trappe.

Silvanus sauta, tombant quelques mètres plus bas bruyamment mais, heureusement pour lui, sur la pierre dur et réconforte, et non pas dans la rivière nauséabonde des égouts. Il eut à peine le temps de s'écarte que déjà le Fou sautait, et se réceptionnait avec légèreté. On voyait désormais la planque des Mains Rouges comme le nez au milieu de la figure. Il y avait, en face, un chemin qui finissait en T et de la lumière venait de l'un des côtés. Ainsi qu'un bruit de pas.

L'homme eut à peine le temps de tourner qu'il s'écroulait au sol. Silvanus se retourna. Le Fou tenait une petite arbalète en main avec une grand sourire espiègle. Il sautilla vers le corps, puis lui fit mine d'être silencieux.

"J'ai cru entendre quelque chose."
"Ouais, Chose est allé voir."
"Hé, Chose! (rires) Tu vois quequ'chose?"

L'absence de réponse les inquiète au bout d'un moment. Silvanus et le Fou étaient plaqués contre le mur, prêts à bondir sur la personne qui oserait venir dans leur direction. Un deuxième homme émergea, s'écroula comme le premier. Hélas, il tomba à l'eau. On entendit aussitôt de nombreux bruits de pas.

"Y s'passe des choses louches ici. V'nez, on va voir."
"Tous ensemble?"
"Ouais. Prenez vos armes".

Silvanus sortit son épée de son fourreau. Ça allait saigner.

Les Mains Rouges déboulèrent. Ils étaient quatre, mais la plateforme étroite des égouts n'en laissait passer que deux. Certains sautèrent sans hésitation dans l'eau putride. Tandis que Silvanus se préparait à les recevoir, le Fou décochait des traits frénétiquement. Les carreaux s'enfonçaient dans leurs armures, sans les tuer pour autant. Il réussit cependant à transpercer le crâne de celui qui s'était jeté à l'eau, avant de ranger délicatement son arbalète et de sortir deux dagues stylisées.

Le combat fut bref, mais éprouvant. Son compagnon se jeta dans la mêlée, tandis que le bandit était contraint de se battre avec le second homme qui avait décidé que l'eau boueuse valait mieux que de ne pas se battre. Il fut blessé au niveau de sa jambe, mais répliqua en décapitant son adversaire. Le Fou avait lui aussi réussi à se débarrasse d'eux. Du coup, il n'y en avait plus que deux vivants, mais en piteux état. Ils pillèrent rapidement leur cachette, récupérant ce qui pouvait l'être, avant de se rendre jusqu'au commanditaire.

C'est vrai qu'aucun mal ne devait leur être fait... Aille...

Ils reçurent cependant leur prime, bien que largement amoindrie. Le Fou lui donna sa part, avant de gambader joyeusement vers d'autres horizons.

"Tout ça pour quatre-vingts misérables Atris..."

Au moins, il avait assez d'argent pour se lancer dans son projet plus pacifique. Car le bandit avait beau être ce qu'il était, il rêvait de temps en temps d'une vie meilleure... D'une vie de marchand. Après tout, la voie vers la richesse devait coïncider avec celle du bonheur...

1988/2 000 mots

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